Prises et réparations de guerre
Au terme de la première guerre mondiale, l'Italie récupéra 1339 obusiers Skoda de 100/17 mod.14 et 95 mod.16, auxquels vinrent s'ajouter les 557 bouches à feu et 56 affûts de 100/17 mod.16 ainsi que les 915 bouches à feu et 735 affûts de 100/17 mod.14 fournis par l'Autriche pour réparations de guerre. Ces armes arrivèrent à point nommé dans les rangs de l'Esercito, qui souffrait du manque d'obusier léger à tir en cloche pour accompagner les canons de 75/27 dans les régiments d'artillerie de campagne. L'obusier de 105/14 produit par Ansaldo sous licence Schneider arriva en effet trop tard pour prendre part au conflit. De plus, sa portée était inférieure à celle de l'obusier Skoda, une pièce moderne, robuste et fiable pour l'époque. Après la Grande Guerre, il fût adopté par les armées autrichienne, yougoslave, roumaine, tchécoslovaque, hongroise, turque (en calibre 105 mm), allemande et polonaise.
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Obusiers Skoda de 100/17 mod.14 exposés à Bolzano suite à leur capture lors de la bataille de Vittorio Veneto. | Artilleurs posant derrière leur obusier de 100/17 mod.16 dans les années 1920. (crédits photo : Fabio Mentesana sur icsm.it) |
Description technique
L'obusier de 100/17 mod.14 s'articulait autour d'une bouche à feu en acier obturée par une culasse à coin à ouverture horizontale, munie d'un dispositif de fermeture automatique au-dessus de la chambre pour faciliter le rechargement à forte hausse. L'extracteur de la douille servait également à arrêter l'ouverture de la culasse. La bouche à feu disposait de quatre sûretés visant à empêcher l'ouverture accidentelle de la culasse, la mise à feu fortuite, l'ouverture spontanée de la culasse et la mise à feu prématurée, avant la fermeture totale de la culasse.
Le berceau supportant la bouche à feu contenait le frein de recul et le récupérateur à ressort. L'affût à flèche unique était percé d'une ouverture de recul derrière le berceau et doté d'un bouclier de 4,7 mm d'épaisseur.
L'obusier de 100/17 mod.14 était précédé d'un avant-train pour la traction hippomobile. Conçu pour être utilisé en montagne, il pouvait être séparé en 3 éléments permettant son transport sur des chemins étroits dans un délai de 20 minutes. Comme pour les autres pièces issues de la Grande Guerre, le problème de la traction mécanisée se posa pour la pièce de 100/17. Classiquement, deux solutions furent adoptées : un train rouleur placé sous l'affût ou la substitution des roues en bois à 12 raies d'origine par des roues métalliques cerclées de bandage semi-pneumatique.
L'obusier da 100/17 mod.16, destiné exclusivement à l'emploi en montagne, conservait les prestations balistiques du modèle 1914. Les principales différences concernaient l'allégement de l'affût et de la bouche à feu, l'ajout d'une sûreté, la réduction du diamètres des roues pour favoriser les déplacements sur les sentiers étroits, l'augmentation de la hausse maximale et l'adoption d'un nouveau bouclier plat en deux parties.
Les principales faiblesses de l'obusier Skoda de 100/17 résidaient dans une portée inférieure à 10 km et un faible secteur de tir horizontal (5° seulement) dû à la flèche unique . Vu le faible stock de munitions récupéré de la Grande Guerre, l'industrie italienne produisit un nouvel obus en 1932 contenant 2,3 kg de TNT et permettant d'augmenter la portée de 500 mètres. Des essais menés par l'AREN avec une bouche à feu longue de 22 calibres pour augmenter davantage la portée ne donnèrent pas de résultats satisfaisants.
Malgré son champ de tir réduit en circulaire et la faible vitesse initiale du projectile, l'obusier de 100/17 fut fréquemment employé dans le rôle antichar. Des projectiles perforants EP furent étudiés pour cette bouche à feu et livrés mi-1942. Ce nouvel obus fut testé en Allemagne en novembre 1942 contre des chars russes capturés et démontra ses capacités contre les T-34 et KV-1. Les munitions EP italiennes de 100 mm se révélèrent au moins aussi efficaces que les munitions HL de 105 mm allemandes, qui contenaient 500 g d'explosif supplémentaires. En mai 1943, un projectile plus puissant, baptisé EPS, fut adopté.
Ainsi, au cours de la seconde guerre mondiale, l'obusier de 100/17 pouvait mettre en oeuvre les munitions suivantes :
- l'obus explosif de 100 pesant 12,730 kg ;
- l'obus double effet de 100 pesant 12,930 kg ;
- l'obus shrapnel de 100 pesant 11,450 kg ;
- l'obus de 100 mod.32 pesant 13,800 kg ;
- l'obus de 100 mod.32 fumigène incendiaire ;
- l'obus de 100 mod.32 fumigène ;
- l'obus de 100 mod.32 lacrymogène ;
- l'obus double effet de 100 mod.32 pesant 13,330 kg ;
- l'obus double effet de 100 mod.36,
- l'obus de 100 antichar EP ;
- l'obus de 100 antichar EPS.
En mai 1943 fut adoptée une couronne-support de 220 kg développée par l'ARET, permettant un pointage en direction de 360° sans devoir déterrer la bêche d'ancrage.
Le centre expérimental de Nettuno étudia un affût en bois pour employer éventuellement le 100/17 dans le rôle antiaérien, mais l'idée resta au stade expérimental.
L'entre-deux guerres
La première unité du Regio Esercito à avoir été équipée de l'obusier de 100/17 mod.14 fut le reggimento d'artiglieria campale misto autoportato, constitué en 1919 pour tester le transport de différentes pièces d'artillerie sur des camions. L'ARET procéda à la révision des pièces de prise de guerre, avec l'aide d'ateliers privés. L'obusier de 100/17 fut employé lors de la conquête de l'Éthiopie, à raison de 3 groupes au 1er avril 1936.
Lors de la guerre civile espagnole, 72 obusiers de 100/17 furent envoyés dans la péninsule ibérique avec le CTV au début de l'année 1937. Le 27 septembre 1937, 120 pièces supplémentaires arrivèrent en Espagne, dont un bon nombre équipèrent les unités nationalistes. À la fin de l'année 1938, le CTV comprenait encore 48 obusiers de 100/17 répartis dans 4 groupes. Durant le conflit, les Républicains capturèrent 4 pièces de 100/17. Au total, l'Italie envoya 252 obusiers de ce type en Espagne, dont 196 furent cédés à l'armée espagnole à la fin de la guerre.
Les obusiers Skoda dans la seconde guerre mondiale
Au 1er octobre 1939, l'Esercito alignait 1325 obusiers de 100/17 mod.14 hippomobiles ou de position, 199 à traction mécanisée et 181 mod.16 de montagne. L'arme constituait alors, avec le canon de 75/27, l'ossature des régiments d'artillerie divisionnaire, à raison d'un groupe par régiment. En avril 1941, 140 obusiers mod.14 et 108 mod.16 étaient déployés en Albanie. En Afrique du Nord, on dénombrait 137 pièces dotées de bandages pleins ou de trains rouleurs en octobre 1941, contre 56 seulement en février 1943. Sur ce théâtre d'opérations, les obusiers Skoda souffrirent particulièrement du transport en tout terrain et furent critiqués pour leur portée nettement insuffisante. Les mêmes faiblesses furent constatées en Russie. Pour remédier au problème du transport en Afrique du Nord, certaines pièces furent montées sur des Lancia 3Ro modifiés, donnant ainsi naissance aux autocannoni da 100/17.
En avril 1942, le Regio Esercito pouvait encore compter sur 173 obusiers de 100/17 mod.16, 194 mod.14 TM (traino meccanico) et 1583 obusiers de 100/17 mod.14 et 100/22 hippomobiles. Les pertes étaient compensées par la fourniture de matériels polonais par les Allemands et par les pièces capturées en Yougoslavie. En juin 1943, il restait encore 37 groupes d'artillerie divisionnaire équipés du matériel Skoda mod.14 (dont 11 motorisés) et 10 groupes sur mod.16. Ainsi, le 100/17 resta l'obusier léger standard de l'armée italienne pendant toute la durée de la guerre, malgré l'apparition en 1941 du 100/22.
L'obusier de 100/17 fut également distribué aux unités de la GaF qui l'utilisèrent comme artillerie de position. Plus de 40 batteries d'obusiers Skoda se trouvaient en dotation à la GaF en 1940, contre 38 en mai 1943.
Après l'armistice, les Allemands réutilisèrent ces obusiers sous le nom de 10 cm FH 315(i). Certaines unités de la RSI en firent également usage : le 3° rgt. de la Div. San Marco comprenait deux groupes hippomobiles de 100/17 (les II et III gr.), tandis que le IV gr. Mantova du 1° rgt.art.alp. de la Div. Monterosa était formé sur 3 batteries hippomobiles de 100/17. Des groupes d'artillerie côtière furent aussi équipés d'obusiers de 100/17, comme la 37a btr. Julia du XII gr.art.PC, 2 batteries du XVI gr.art.PC et la 8a btr. du III gr.art.PC.
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Obusier de 100/17 mod.14 du XII gr.art.PC dans le secteur de Monte Lesco. (crédits photo : Matteo Crivellari) |
Les ultimes évolutions d'après-guerre
Au terme de la seconde guerre mondiale, l'obusier Skoda resta en service dans l'armée italienne dans ses versions modernisées mod.16/50 de montagne et mod.14/50 de campagne, équipées d'une couronne-support identique à celle de l'obusier anglais de 25 livres. L'arme fut ensuite allongée pour passer au calibre 105/22 dans son modèle 14/61 utilisant des munitions OTAN. Dans cette ultime version, un frein de bouche fut ajouté et la hausse maximale passa de 48° à 65°.
L'arsenal de Turin développa des équipements spécifiques pour le transport des obusiers de 100/17 sur la plate-forme des camions Lancia Esaro, une suspension à ressorts à lames et des roues dotées de pneus. L'unique unité d'artillerie de l'Esercito envoyée en Somalie dans les années 1950 était une batterie d'obusiers de 100/17. L'obusier resta en service jusqu'au milieu des années 1980.
Obice da 100/17 mod.14 | Obice da 100/17 mod.16 | |
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Longueur de la bouche à feu | 1930 mm | 1930 mm |
Longueur totale en batterie | 5300 mm | 5380 mm |
Voie | 1530 mm | 950 mm |
Poids de la bouche à feu | 403 kg | 392 kg |
Poids de la pièce en batterie | 1417 kg | 1235 kg |
Équipe de pièce | 1 chef de pièce et 6 canonniers | 1 chef de pièce et 6 canonniers |
Pointage | en hauteur : -8° à +48° en direction : 5° 21' |
en hauteur : -8° à +70° en direction : 5° 5' |
Cadence de tir | maximale : 10 coups/min pratique : 4 à 5 coups/min |
maximale : 10 coups/min pratique : 4 à 5 coups/min |
Vitesse initiale du projectile | 430 m/s | 430 m/s |
Portée maximale | 9200 m | 9200 m |
Sources :
- Le artiglierie del Regio Esercito nella Seconda Guerra Mondiale, Filippo Cappellano, Storia Militare, 1998
- Le artiglierie del Regio Esercito nella Seconda Guerra Mondiale, Enrico Finazzer, Italia Storica, 2012
- L'artiglieria italiana nella Grande Guerra, Andrea Curami & Alessandro Massignani, Gino Rossato Editore, 2011
- Cenni descritivi del pezzo da 100/17 mod.914, Arsenale R. Esercito - Torino, 1926
- Cenni descritivi del pezzo da 100/17 mod.916, Arsenale R. Esercito - Torino, 1926
- La campagna italo-etiopica (1935-36), tomo I, Luigi Emilio Longo, Stato Maggiore dell'Esercito, Ufficio Storico, 2005
- La artilleria en la guerra civil, Material de origen italiano importado por el ejercito nacional, Artemio Mortera & José Luis Infiesta, Quiron ediciones, 1997
- Batallas de la guerra civil española, Lucas Molina Franco, Rafael Permuy López, Fernando Calvo González-Regueral & Juan Vázquez García, Susaeta, 2012
- Legionari, Un sudtirolese alla guerra di Spagna (1936-1939), Andrea di Michele, Marina Miquel & Margarida Sala, Nicolodi, 2007
- Forze Armate della R.S.I. sul confine orientale, Settembre 1943 - Maggio 1945, Carlo Cucut, Marvia Edizioni, 2009
- L'esercito italiano nel 1943, parte 1a, Filippo Cappellano, Storia Militare Dossier n°5, 2012
- page sur l'obusier de 100/17 mod.14 du site Regio Esercito
- page sur l'obusier de 100/17 mod.16 du site Regio Esercito
Pour reproduire cette pièce d'artillerie :
Fabricant | Échelle | Référence et désignation | Galerie |
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1/72 | MarS | 7275.2 100 mm Skoda 100/17 m 14 | - |
1/72 | BP Resin | T72020 10,0 cm mod.14 Feldhaubitze | - |
1/35 | CRI.EL Model | R038 Obice Skoda 100/17 mod.14 | - |
1/35 | CRI.EL Model | R075 Ammo for Obice 100/17 | - |
1/35 | IBG Models | 35026 Skoda 100 mm vz 14 Howitzer | - |
1/35 | IBG Models | 35028 Obice da 100/17 mod.16 | - |
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