Activité avant guerre
Le croiseur léger Emanuele Filiberto Duca d'Aosta fut le premier navire de la classe éponyme à être mis sur cale, le 29 octobre 1932, au chantier OTO de Livourne. Construit sur la cale Morosini, le navire fut lancé le 22 avril 1934. Lors des essais à la mer, le croiseur fut placé sous le commandement du C.V. Da Zara. L'achèvement à flot eut lieu à La Spezia, tout comme l'admission au service actif le 13 juillet 1935.
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Lors des essais sur la base de vitesse Isola del Tino - Punta Chiappa au printemps 1935, l'Aosta dépassa les 37 noeuds. (crédits photo : collection Aymeric Lopez) |
Quittant La Spezia pour Tarente le 20 août avec une escale à Augusta, l'Aosta devint quelques jours plus tard le navire amiral de la 7a Div.Incr. Le 26 octobre 1936, le croiseur gagna Naples pour participer à la revue navale en l'honneur de l'amiral Horty.
Pendant la guerre d’Espagne, l'Aosta fut employé à la protection du trafic marchand entre la Sardaigne et les côtes espagnoles entre le 18 et le 26 janvier 1937. Le 14 février, le croiseur appareilla de Palma de Majorque pour participer au bombardement de Valence.
Du 14 au 21 mars 1938, les navires de la 7a Div.Incr. réalisèrent une croisière en Libye à l'occasion de la visite de Mussolini dans la colonie. Le 5 mai, l'Aosta participa à la revue navale en l'honneur d'Hitler dans la baie de Naples.
Le 5 novembre 1939, l'Aosta et l'Eugenio di Savoia débutèrent une croisière de représentation qui devait les mener en Europe du Nord, en Extrême Orient et en Amérique Latine. Fin janvier 1939, après avoir fait escale au Brésil, en Argentine, au Chili et au Pérou, le regain de tensions en Europe entraîna le retour prématuré des navires par la route la plus courte. Après avoir franchi le canal de Panama, les deux croiseurs firent halte au Vénézuela et aux Açores avant de gagner La Spezia le 3 mars.
Le 15 mai 1939, l'Aosta prit part à la revue navale en l'honneur du roi Paul de Yougoslavie en baie de Naples. En juin, le croiseur escorta le convoi ramenant en Italie les légionnaires du CTV après la victoire franquiste en Espagne.
L'Aosta dans la seconde guerre mondiale
L'activité de l'Aosta pendant la seconde guerre fut particulièrement intense. Le 7 juillet 1940, la 7a Div.Incr appareilla de Palerme pour se joindre à la 2a Sq. afin d'escorter un important convoi à destination de la Libye. La sortie concomitante de la Mediterranean Fleet aboutit à la bataille de Punta Stilo le 9 juillet. L'Aosta n'ouvrit pas le feu contre les navires adverses mais ses pièces de DCA engagèrent trois appareils de reconnaissance. La 7a Div.Incr rentra à Naples le matin du 10 juillet.
Le 31 août, l'Aosta appareilla de Brindisi pour intercepter les navires britanniques de l'opération Hats partis d'Alexandrie pour ravitailler Malte. Mais la tempête qui se déclara au matin du 1er septembre contraignit les navires italiens à faire demi-tour. Basé à Brindisi en septembre, l'Aosta gagna Tarente le 27 du mois. Entre le 2 et le 4 décembre, la 7a Div.Incr appareilla de Brindisi pour protéger l’intense trafic maritime dans le canal d'Otrante visant à alimenter la guerre contre la Grèce. La mission fut renouvelée les 13 et 14 décembre.
Le 15 décembre, l'Aosta quitta Brindisi à destination de La Spezia pour une période d'entretien durant laquelle le croiseur reçut son premier schéma de camouflage. Les travaux s'achevèrent le 11 février 1941. Le lendemain, le navire effectua une première sortie pour les essais machine avant d'appareiller le 15 février pour gagner Tarente le 17. Mis à disposition de la 8a Div.Incr, il revint dans les rangs de la 7a Div.Incr mi-mars.
Les 20 et 24 avril 1941, l'Aosta participa au mouillage de mines pour constituer le barrage S1 au large du cap Bon. Entre le 29 avril et le 2 mai, il effectua une mission de mouillage de mines au large de Tripoli pour renforcer le barrage T. Du 4 au 7 mai, la 7a Div.Incr. reprit la mer pour constituer l’escorte indirecte de deux convois entre Naples et Tripoli. Entre le 2 et le 4 juin, l'Aosta compléta le barrage T devant Tripoli. Le 28 juin, il participa au mouillage du second tronçon du barrage S, puis à celui du troisième tronçon le 7 juillet.
Du 5 au 18 août 1941, l'Aosta fut basé à Palerme entre deux sorties d’exercice. Le 29 novembre à midi, le croiseur, portant la marque de l'Amm.Div. De Courten, appareilla de Tarente avec la 7a Div.Incr. pour participer à l'escorte indirecte du convoi Duisburg. Mais à 19h00, les unités reçurent l'ordre de rentrer au port malgré les menaces que les forces H et K faisaient peser sur le convoi. En effet, suite à une avarie du Garibaldi qui dut rentrer à Tarente escorté par le Duilio, SUPERMARINA jugea que les 3 croiseurs et les 3 contre-torpilleurs de la 7a Div.Incr. n'étaient pas de taille à affronter les unités anglaises, surtout de nuit.
Entre le 16 et le 17 décembre, l'Aosta participa à l'opération M42 qui déboucha sur la première bataille de la Syrte. Du 3 au 6 janvier 1942, l'unité fut engagée dans l'opération M43, qui consistait en l'escorte directe d'un convoi à destination de Tripoli. Le 22 janvier, le navire appareilla de nouveau de Tarante à la tête de la 7a Div.Incr. pour l'escorte d'un convoi vers Tripoli (opération T38). Les croiseurs rentrèrent à Tarente le 25 janvier.
Du 1er au 5 mars, l'Aosta resta indisponible pour une phase d'entretien de ses chaudières. Le 5 mars, la marque de l'Amm.Div. Da Zara retourna sur l'Eugenio, de retour d'une période d'entretien.
Le 15 mai 1942, l'Aosta fut incorporé dans la 8a Div.Incr. C'est dans ses rangs que le navire participa aux opérations de mi-juin 1942. Le 14 juin, l'Aosta appareilla de Tarente pour intercepter le convoi Vigorous venant d’Alexandrie. Mais devant la puissance de l'escadre italienne, les Anglais renoncèrent au passage de leur convoi et l'Aosta rentra à Tarente le 16 juin.
Du 2 juillet au 8 novembre 1942, la 8a Div.Incr. fut basée dans la rade de Navarin, en Grèce, dénommée 1a base mobile. Ce déploiement devait assurer la protection des convois de l’Axe en Méditerranée centre-orientale. Cependant, aucune mission ne fut effectuée au départ de cette base du fait que les convois à destination de la Cyrénaïque ne subirent pas de menace durant cette période. Lors du retour à destination d'Augusta, l'Aosta fut attaqué par des avions torpilleurs dans la nuit du 9 au 10 novembre. Une torpille passa sous la quille à la hauteur de la tourelle n°2 sans causer de dégâts.
Au début de l'année 1943, l'Aosta se trouvait à Messine. Le 31 janvier, il partit pour Tarente où il resta jusqu'au 10 juillet pour un grand carénage. Le 11 juillet, il appareilla pour La Spezia où il retrouva la 7a Div.Incr. Dès le 14 juillet, l'Aosta partit pour Gênes où il rejoignit la 8a Div.Incr. Le 6 août, le croiseur appareilla de Gênes pour se rendre à La Maddalena. Il devait intercepter un convoi ennemi se rendant à Palerme mais la forte escorte repérée par un avion allemand conseilla la prudence et l'Aosta rentra à La Spezia le 7 août. Deux jours plus tard, l'unité retourna à Gênes.
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L'Aosta mettant en oeuvre des fumigènes au printemps 1943. | L'Aosta lors d'une sortie d'exercice au large de Gênes le 21 août 1943. |
D'Ouest en Est
Suite à l'armistice, l'Aosta appareilla de Gênes le 9 septembre à 3h20 et gagna Malte le lendemain. Après un mois d'internement à Alexandrie, l'unité put regagner Tarente le 18 octobre. Le 27 octobre, l'Aosta appareilla pour sa première mission au profit des Alliés. Après une semaine d'escale à Gibraltar, il gagna Freetown qui lui servit de port d'attache pour des missions de surveillance en Atlantique jusqu'au 25 mars 1944. Le 3 avril l'Aosta était de retour à Tarente.
L’Aosta ne reçut jamais de radar Fu.Mo 21/39 De.Te allemand, bien que le mât devant le recevoir ait été mis en place à l’été 1943. Ce n’est que durant l'été 1944 qu’il fut équipé d'un radar anglais type 286, qu'il ne conserva cependant que quelques mois. Le navire termina la guerre en réalisant de nombreuses missions de transport de personnels et de matériels.
Selon les clauses d'armistice, l'Aosta revenait à l'URSS. Après un grand carénage à La Spezia, le navire fut rayé de la liste navale le 12 février 1949 avant d'être livré aux autorités soviétiques à Odessa le 2 mars. Rebaptisé Stalingrad puis Kertch, il resta en service dans la flotte de la mer Noire jusqu'en 1959, d'abord comme navire d'active puis comme croiseur école entre 1956 et 1958, pour finir comme navire expérimental, désigné OS-32.
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L'Aosta au mouillage à Tarente le 16 juin 1946. | L'Aosta à La Spezia en 1947. (crédits photo : collection Aymeric Lopez) |
L'Aosta au bassin de carénage à La Spezia en 1948. (crédits photo : collection Giorgio Parodi) |
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Le Kertch portant encore sa livrée italienne. (crédits photo : collection V.V. Kostritchenko sur navsource.narod.ru) |
Le Kertch croisant en mer Noire entre 1950 et 1954. (crédits photo : collection Bargoni via Aymeric Lopez) |
Le Kertch à Odessa le 5 juin 1958. (crédits photo : collection V.V. Kostritchenko sur navsource.narod.ru) |
Sources :
- In guerra sul mare, Erminio Bagnasco, Ermanno Albertelli Editore, 2005
- Le navi da guerra italiane 1940-1945, Erminio Bagnasco & Enrico Cernuschi, Ermanno Albertelli Editore, 2005
- Navi e marinai italiani nella Seconda Guerra Mondiale, Elio Ando & Erminio Bagnasco, Ermanno Albertelli Editore, 1999
- Incrociatori leggeri classe Condottieri gruppo Duca d'Aosta, parte prima, Elio Andò, Franco Bargoni & Franco Gay, Orizzonte Mare 7/III, Edizioni dell'Ateneo, 1985
- Incrociatori leggeri classe Condottieri gruppo Duca d'Aosta, parte seconda, Elio Andò, Franco Bargoni & Franco Gay, Orizzonte Mare 7/IV, Edizioni dell'Ateneo, 1985
- Incrociatori leggerri classi Raimondo Montecuccoli, Emanuele Filiberto Duca d’Aosta, Franco Bargoni, Orizzonte Mare immagini A6, Edizioni dell'Ateneo & Bizzarri, 1979
- Włoski lekki krążownik Emanuele Filiberto Duca d’Aosta, Sławomir Brzeziński, Profile Morskie n°35, Wydawniczo-Handlowa, 2001