Développement et production
Dès la fin des années 1930, le Regio Esercito souhaitait rendre mobile sa pièce d’artillerie antichar standard, le canon de 47/32, afin d’apporter un appui feu rapproché aux unités de bersaglieri et de cavalerie en première ligne. Au début de la seconde guerre mondiale, cette arme d’origine autrichienne affichait des performances satisfaisantes : une pénétration de 43 mm à 500 m, une grande précision et un faible poids. Elle était en revanche privée de bouclier, ce qui exposait ses servants, et se prêtait mal à la traction mécanique.
Une première tentative pour « motoriser » le 47/32 fut présentée par la firme Breda avec un prototype basé sur un châssis de L 3/35. Ce premier semovente, qui n’offrait qu’une protection très restreinte à l’équipage, fut vite abandonné.
À partir de janvier 1941, Ansaldo étudia à son tour un projet de semovente en se basant cette fois-ci sur le nouveau char léger L 6/40. Son prototype fut présenté au CSM le 10 mai 1941. Initialement, la partie supérieure de la casemate était fermée par un toit blindé muni de deux panneaux pour l'accès de l'équipage et d'un périscope. Cependant, aucun système d’évacuation des gaz n’étant prévu, le toit blindé fut supprimé.
La production fut confiée à l'usine Fiat-SPA de Turin. Initialement, 283 exemplaires du semovente L 40 furent commandés en substitution d’autant de chars L 6/40, jugés obsolètes. La commande fut finalement portée à 460 exemplaires en mai 1943, bien en-deçà des espoirs de l’armée qui souhaitait voir remplacer 1960 canons en première ligne.
La production débuta en janvier 1942, atteignant une cadence mensuelle de 30 machines en avril, réduite à 25 en juin puis à 13 à la fin de l’année. En mai 1943, 282 semoventi L 40 avaient quitté les chaînes de production. À la veille de l’armistice de septembre 1943, un total de 320 exemplaires avait été livré.
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Poste de montage des chenilles sur la ligne d'assemblage des semoventi L 40 à l'usine SPA de Turin le 7 octobre 1942. | Semoventi L 40 en attente de livraison à l'usine SPA. |
Description technique
Le semovente L 40 était construit sur une caisse pratiquement identique à celle du L 6/40. Il partageait également les mêmes organes de propulsion et le même train de roulement que le char léger.
Son armement principal, le canon de 47/32, était monté sur la gauche d’une casemate redessinée pour l’accueillir avec son système de visée et ses commandes de tir à pédale. Le canon avait un secteur de tir horizontal de 27° et une hausse de –12° à +20°.
Le toit de la casemate était ouvert, mais l’équipage avait la possibilité de le couvrir avec une bâche imperméable dépliable. Le poste du conducteur se trouvait à droite du canon, légèrement en retrait, avec pour conséquence une faible visibilité sur la gauche. Le chef de char remplissait aussi le rôle de tireur et, au départ, servant. Il disposait de deux caisses pour le stockage des munitions, l’une derrière le siège du conducteur avec 33 coups et l’autre fixée à la paroi droite de la casemate contenant 37 projectiles.
La trappe d’accès latérale sur le côté droit de la casemate, devenue inutile, était soudée en position fermée sur les exemplaires de début de production, puis disparue purement et simplement sur les exemplaires de fin de production (à partir du n°55063). Le phare placé à l’angle avant gauche de la casemate fut également supprimé à cause des aménagements réalisés pour le canon.
Outre la disparition de la porte d’accès latérale, d’autres modifications furent apportées sur les semoventi au cours de leur production : adoption d'un capot moteur simplifiée, ajout d'une protection thermique sur le pot d’échappement (à partir du moteur n°100566) et substitution des roues tendeuses par un nouveau modèle plus robuste. À partir du premier semestre 1942, l’équipage passa de deux à trois hommes, le chef de char se voyant libéré de son rôle de servant.
À cause de l’exiguïté de la casemate, le semovente L 40 était dépourvu de tout appareillage radio, ce qui n’était pas sans poser des problèmes de coordination entre les véhicules. Pour tenter d’y remédier fut développée la variante comando plotone qui était pourvue d’un poste émetteur/récepteur RF 1 CA sur la droite de la casemate, en contrepartie d’une réduction de l’emport en munition (49 coups au lieu de 70). L’antenne était fixée à l’arrière de la casemate, sur la droite.
Une version comando compagnia fut mise au point en décembre 1941 en substituant le canon de 47/32 par une mitrailleuse Breda mod.38. La place gagnée sur l’armement et les munitions permettait d’y installer un deuxième poste radio de type RF 2 CA, dont l’antenne se trouvait aussi à l’arrière de la casemate, du côté gauche cette fois. Pour éviter une identification trop aisée de ce véhicule, la Breda mod.38 était camouflée dans un tube en bois reproduisant celui du canon.
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Carro comando compania identifiable à ses deux antennes radio et à sa mitrailleuse Breda mod.38 travestie en canon. |
Au front
Conçu pour remplacer l'artillerie antichar tractée, le semovente L 40 apparut fort logiquement dans l'ordre de bataille théorique de la division blindée édité en août 1941, qui prévoyait de l'affecter au bataillon antichar divisionnaire sur deux compagnies, pour un total de 21 canons d'assaut. L'ordre de bataille de juin 1942 prévoyait également la formation de bataillons antichars sur trois compagnies, avec un effectif de 31 semoventi L 40, porté à 34 en décembre de la même année. Dans les faits, ces blindés furent surtout distribués à des bataillons autonomes et aux groupes (sur deux ou trois escadrons) des régiments de cavalerie et des RECo.
En Afrique du Nord, le semovente L 40 fut engagé lors de la campagne de Tunisie. Les I et CXXXVI btg.cc. sur 2 compagnies gagnèrent la Tunisie en novembre 1942 et furent incorporés dans le XXX CA. Le 15° RECo Cavalleggeri di Lodi aurait dû être la première équipée de semoventi L 40 à gagner l'Afrique. Le sort en décida autrement : suite au naufrage du cargo Francesco Barbaro qui transportait les semoventi du 5° sqd. du II gr.sqd., coulé par le sous-marin HMS Umbra le 28 septembre 1942, l'unité ne put gagner la Tunisie qu'en février 1943.
Après la campagne de Tunisie, les Alliés débarquèrent en Sicile le 13 juillet 1943. Plusieurs unités équipées de semoventi da 47/32 participèrent à la défense de l'île : le IV btg.cc. rattaché à la Div.ftr Livorno ainsi que les CXXI, CXXX, CXXXII, CXXXIII, CCXXX et CCXXXIII btg.cc.. Sacrifiés dans la tentative de ralentir le rouleau compresseur allié, bien peu de semoventi L 40 purent se retirer sur le continent en traversant le détroit de Messine.
Les 19 semoventi L 40 du XIII gr.sqd. du rgt. Cavalleggeri di Alessandria partirent pour le front de l'Est le 3 août 1942. Ils furent tous perdus lors de l'offensive soviétique sur le Don, alors qu'ils avaient été envoyés le 11 décembre en renfort des divisions Cosseria et Ravenna. L'unité fut reconstituée en mai 1943 à Codroipo.
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Semovente L 40 du XIII gr.sqd. Cavalleggeri di Alessandria sur le front russe. | L 6/40 et semovente L 40 abandonnés sur le front de l'Est en janvier 1943. |
Le IV gr.cr. du rgt. Cavalleggeri di Monferrato fut envoyé en Albanie en 1942. Il était équipé de L 6/40 et de semoventi L 40. Une unité dotée de 19 semoventi L 40 gagna la Grèce en décembre 1942. Trois semoventi L 40 encadrés au sein du XL btg. du 5° rgt.bers. appuyèrent la Div. Taurinense au Monténégro.
Les 10 semoventi L 40 de la 5a cp. du LXIX btg.bers. appartenant au 18° rgt.bers. motocorazzato furent envoyés dans le Sud de la France au début de l'année 1943. Rapatriée en juillet, l'unité n'eut pas le temps de gagner Rome au moment de l'armistice. Quant au XX btg.cc. sur 2 compagnies de semoventi da 47/32 constitué en octobre 1942, il fut déployé en Corse en 1943. Le CXXXI btg. du 31° rgt.ftr.car., lui aussi sur deux compagnies, fut également envoyé sur l'île de beauté. Ces deux unités y étaient encore au moment de l'armistice.
Lors de la défense de Rome entre le 9 et le 11 septembre 1943, le II gr.sqd. du 8° RECo Lancieri di Montebello engagea ses 11 semoventi da 47/32 en soutient de la division Granatieri di Sardegna.
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Semovente L 40 lors des combats pour la défense de Rome suivant l'armistice du 8 septembre 1943. | Carcasse de semovente L 40 devant l'obélisque d'Axoum au Circo Massimo en septembre 1943. |
Le semovente L 40 après l'armistice
Après l'armistice, la production du semovente L 40 se poursuivit pour la Wehrmacht dans une nouvelle variante désignée type G construite à 120 exemplaires entre octobre 1943 et octobre 1944. Il s'agissait d'un modèle équipé du poste radio RF 1 CA, de flancs de casemate rehaussés et armé d'une mitrailleuse Breda mod.38 munie d'un bouclier, montée sur un support coulissant sur une barre transversale sur l'avant de la casemate.
En plus des exemplaires produits à leur demande, les troupes allemandes prirent possession de 86 semoventi L 40 (désignés StuG L6 mit 43/32 630(i) par la Wehrmacht) suite à l'armistice et les réemployèrent en Italie du Nord et dans les Balkans. Dans ce secteur, les Oustachis croates et les partisans yougoslaves de Tito mirent également la main sur plusieurs exemplaires de ce blindé. Les Allemands en fournirent également à la garde nationale slovène (Slovensko domobranstvo).
Quelques exemplaires furent incorporés dans les forces armées de la RSI. L'un d'eux équipait le I btg.bers. volontari Benito Mussolini et fut utilisé dans la lutte anti partisans autour de Gorizia durant les premiers mois de 1944. Inadapté à ce type de guérilla, il aurait été abandonné ou cédé à une autre unité. Le gr.sqd. San Giusto possédait deux semoventi da 47/32 de fin de production, probablement cédés par les Allemands lorsque l'unité se trouvait à Gorizia. Le RAP reçut également en dotation deux semoventi L 40 à la fin de l'année 1944, provenant du dépôt de Caselle. Enfin, le gr.cr. Leonessa de la GNR alignait cinq semoventi L 40. C'est à proximité de Piacenza que, le 26 avril 1945, un semovente L 40 de la Leonessa participa au dernier combat de la guerre entre blindés italiens et alliés.
Après guerre, quelques exemplaires du semovente L 40 furent utilisés par les forces de police pour le maintien de l'ordre.
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Semoventi L 40 lors d'une opération de maintien de l'ordre dans le secteur du Viminale après guerre. La présence du réservoir d'essence sur le capot du blindé au premier plan est plutôt insolite. |
Considérations
Armé du canon de 47/32 adopté en 1935, ce semovente se révéla inefficace contre les derniers chars ennemis au moment de son apparition sur le champ de bataille à la fin de l’année 1942. En revanche, le semovente L 40 avait encore son utilité dans le rôle de l’accompagnement de l’infanterie, où il pouvait engager des objectifs moins bien protégés que les chars, même si là encore, la distance utile de tir n’excédait pas 700 mètres.
Outre son faible armement, le semovente L 40 était handicapé par l’absence de mitrailleuse pour la défense rapprochée, une lacune qui ne fut comblée que sur la dernière version produite pour les Allemands après l’armistice.
Longueur | 3820 mm |
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Largeur | 1860 mm |
Hauteur | 1690 mm |
Garde au sol | 400 mm |
Poids en ordre de combat | 6825 kg |
Équipage | 3 (2 à l'origine) |
Moteur | Type 18VT essence 4 cylindres de 4053 cm3, développant 68 ch à 2500 tr/min |
Vitesse maximale | 42,3 km/h sur route 20 à 25 km/h en tout terrain |
Autonomie | 200 km sur route 100 km en tout terrain |
Emport en carburant | 165 L |
Protection | 6 à 30 mm |
Armement | 1 canon de 47/32 (70 coups) 1 mitrailleuse Breda mod.38 de 8 mm sur les exemplaires produits en 1944 |
Sources :
- Carro L 6, Carri leggeri, semoventi, derivati, Andrea Tallillo, Antonio Tallillo & Daniele Guglielmi, Gruppo Modellistico Trentino, 2007
- Carri leggeri, L.6/40 sviluppo ed operazioni, Carri Armati 2/III, Fronte Terra, Bruno Benvenuti & Ugo F. Colonna, Edizioni Bizzarri, 1974
- Gli autoveicoli da combattimento dell'Esercito Italiano, Volume secondo (1940-1945), Nicola Pignato & Filippo Cappellano, Stato Maggiore dell'Esercito, Ufficio Storico, 2002
- La meccanizzazione dell'esercito dalle origini al 1943, Tomo II, Lucio Ceva & Andrea Curami, USSME, 1994
- Corazzati Italiani 1939-1945, War Set n°10, Nico Sgarlato, 2006
- Mezzi dell'Esercito Italiano 1935-45, Ugo Barlozzetti & Alberto Pirella, Editoriale Olimpia, 1986
- Italian armoured vehicles 1940-1943 : A pictorial history, Luca Massacci, Roadrunner, 2013
- I mezzi blindo-corazzati italiani 1923-1943, Nicola Pignato, Storia Militare, 2005
- The first forty years of italian armoured vehicles, Paolo Emilio Papò, IBN Editore, 2011
- Italian Armored Vehicles of World War Two, Nicola Pignato, Squadron/signal publications, 2004
- Andare contro i carri armati, L'evoluzione della difesa controcarro nell'esercito italiano dal 1918 al 1945, Filippo Cappellano & Nicola Pignato, Gaspari editore, 2007
- Italian artillery of WWII, Enrico Finazzer & Ralph A. Riccio, MMP Books, 2015
- L'onore dimenticato, I ragazzi della Divisione Livorno, Pier Luigi Villari, IBN Editore, 2013
- Il gruppo corazzato « San Giusto » dal Regio Esercito alla RSI 1934-1945, Stefano Di Giusto, Laran Éditions, 2008
- I reparti corazzati della Repubblica Sociale Italiana 1943/1945, Paolo Crippa, Marvia Edizioni, 2006
- …Come il diamante, I Carrisit italiani 1943-45, Sergio Corbatti & Marco Nava, Laran Éditions, 2008
- I mezzi corazzati italiani della guerra civile 1943-1945, Paolo Crippa, TankMasterSpecial n°05, 2015
Pour reproduire ce véhicule :
Fabricant | Échelle | Référence et désignation | Galerie |
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AP Models | 1/72 | 72035 Semovente L6/40 47/32 carro cannone | Maquette de Paolo Crippa |
AP Models | 1/72 | 72036 Semovente L6/40 Comando Plotone | - |
AP Models | 1/72 | 72037 Semovente L6/40 Comando Compagnia | - |
GB Modelli | 1/72 | 72017 Semovente Ansaldo L40 da 47/32 | - |
CRI.EL Model | 1/35 | R016 Ansaldo Fiat L6 Self propelled tank Stug L6 mit 47/32 (770 i) | - |
CRI.EL Model | 1/35 | R026 Fiat Ansaldo L6/40 Comando | - |
Italeri | 1/35 | 6477 Semovente L40 da 47/32 | - |
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